Le renouveau du film de cape et d’épée
Adaptation d’une nouvelle de Madame de Lafayette qui voit une jeune noble épouser, malgré elle, un aristocrate de meilleur rang au détriment d’un autre qu’elle aime sincèrement, le tout sur fond de guerre de religions.
Un Bertrand Tavernier encore et
toujours au meilleur niveau, trésor national du cinéma, creuse un
peu plus son sillon et peaufine sa filmographie.
Il faut rendre hommage aux
costumes qui sont magnifiques, illuminent les cadres, les personnages
et les scènes, subliment l’image comme un prisme qui éparpille,
diffuse ses couleurs. Des costumes d’une Renaissance élégante et
distinguée au milieu du conflit brutal entre catholiques et
huguenots, à base de pantalon bouffant.
La relation adultérine entre
Mélanie Thierry et Gaspard Ulliel est d’une rare et grande
intensité, concentrée autour d’un fil ténu de sincérité, un
grésillement de pur sentiment, à croire que ces deux là ont vécu
une véritable histoire pendant le tournage.
Lambert Wilson, le comte de
Chabannes, a le meilleur rôle de ce petit marivaudage, de
l’entrecroisement des sentiments. Il se dégage de lui une majesté
ainsi qu’une profonde bonté, une sagesse héritée du traumatisme
de ses combats huguenots qui le verront enfoncer sa dague dans le
ventre d’une femme enceinte pour se défendre. Professeur
omniscient de la jeune princesse dont il tombera amoureux avant de
trouver une mort inattendue et héroïque au détour d’une
pérégrination.
Il y a des plans-séquences de
toute beauté, magnifiquement chorégraphiés, à l’image du plan
d’ouverture où la caméra entame un ballet avec la végétation,
promesse d’un voyage somptueux au cœur de la Renaissance. Les
dialogues sont à la hauteur, mélange de français soutenu, enrobé
de préciosité, un langage courtois et classique qui fait le pont
entre cette époque et notre contemporanéité.
Un seul bémol, les scènes de
batailles, quoique très bien orchestrées, où l’action est
programmée au millimètre, on sait que l’on est dans un film
français par la négligence des coups portés à l’épée ou
ceux-ci peuvent passer à dix centimètres de l’ennemi qui
s’écroule au sol comme s’il avait été touché. Je pense
qu’un producteur américain n’aurait pas laissé passer cela
quitte à retourner la scène.
Pour conclure, un film fascinant,
passionnant et envoûtant, réalisé par un maître qui connaît le
septième art comme sa poche et en respecte la culture, le sens, les
codes esthétiques et l’harmonie visuelle.
Comme un grand cru, il prendra de
la valeur au fil des années.
Samuel d’Halescourt
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